FNA 1891 Saigneur de guerre by Manuel Essard

Auteur:Manuel Essard [Manuel Essard]
La langue: fra
Format: epub
Tags: SF
Éditeur: Fleuve Noir Anticipation
Publié: 1992-08-31T22:00:00+00:00

4

Un peu honteuse de sa nuit, la princesse Fhillor évitait Erfield. Et il n’y avait rien de plus simple à faire dans le dédale des Balmes Rouges. Elle s’était restaurée en compagnie de Kryobezt, qui l’informa que le capitaine désirait l’entretenir après la collation matinale. Sur ces entrefaites, Erfield était entré dans le réfectoire, avait salué l’assemblée puis décoché un superbe sourire à Fhillor. La joie brillait dans son regard et Fhillor se tenait prête à l’envoyer sur les roses si le mercenaire n’avait jugé bon de s’abstenir de tout commentaire. Erfield reparti, Fhillor put enfin savourer son repas.

Elle se demandait, alors qu’elle cheminait vers les appartements du Chevalier de Sang, si l’attitude d’Erfield n’était pas la manière d’exprimer cette admiration qu’il lui portait. Elle devait reconnaître qu’il n’avait pas claironné sa conquête. « Je suis peut-être injuste envers lui…, songea-t-elle, il n’y avait aucun orgueil ni victoire dans son regard. » Elle haussa les épaules, il était trop tard pour s’excuser : elle parvenait chez son hôte. Elle frappa puis entra sans attendre de réponse.

Le Chevalier de Sang était assis, revêtu de sa superbe armure, derrière son bureau et consultait des parchemins étalés devant lui. Il leva la tête quand Fhillor pénétra dans la pièce puis sourit.

— Bonjour, Fhillor ! Êtes-vous reposée de votre expédition ?

La bienveillance et la politesse enchantèrent la princesse, qui acquiesça d’un hochement sincère. Elle s’installa sur le banc que le capitaine lui désignait de la main et attendit la suite.

— J’ai appris que l’un de vos compagnons s’est introduit dans votre chambre lors de la nuit…

Le rouge envahit les pommettes de la jeune femme.

— Si vous désirez que cela cesse, un mot de vous suffit.

— Non… euh…

Elle était troublée par la tournure de cette rencontre. Un sentiment de colère monta en elle.

— Toute action dans les Balmes est sous votre surveillance ? Dois-je justifier mes faits et gestes ?

— Non, bien sûr. Mais nous connaissons de réputation le mercenaire Erfield. C’est un coureur de jupons et je ne crois pas que votre mère verrait d’un bon œil cette liaison.

La surprise coupa le souffle de Fhillor. Elle se leva à demi.

— Ma mère ? s’étonna-t-elle Écoutez-moi, capitaine, je crois être assez grande pour faire ce dont j’ai envie. Je ne tiens pas à ce que l’on s’immisce dans mes affaires privées.

Le Chevalier de Sang écarta les bras, les paumes en avant.

— Certes ! Très bien, Fhillor ! Je voulais simplement vous faire comprendre que vous n’étiez pas ici en simple visiteuse.

— Comment cela ? C’est la deuxième fois que j’entends ce genre d’allusion ! Qu’est-ce…

— Vous êtes une Vampire, Fhillor ! coupa-t-il. Et, de par votre ascendance, vous êtes tenue de vivre dans les Balmes. Mais, comme votre mère ne l’était pas, je pense que je vous autoriserai à chevaucher le monde autant qu’il vous siéra !

Interloquée, Fhillor ne sut quoi répondre. Cette différence, qu’elle avait tant désirée, lui apparaissait aujourd’hui comme un poids. Elle baissa légèrement les yeux, cherchant une réponse déconcertante, mais ne trouva rien qui pût affirmer son autorité.

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